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C’est avec Dil, un petit, a priori maigrichon mais surtout très musclé guide/porteur, au sourire jovial et au visage ridé et tanné par le soleil tel un ancien parchemin, que je passais ces 26 jours de trek incroyables.
Dil nous vient de Dhading, à 6 heures de bus à l’ouest de Kathmandu. 47 ans, et toutes ses dents, 15 ans d’expérience de trek, et une carte 3D imprimée dans la tete, il est de confession hindu; j’aime quand il porte son petit chapeau traditionnel, qu’il a bien vite troqué contre un non moins atypique bonnet népalais aux traits de Totoro!
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Père de 2 enfants, une fille de 21 ans qu’il espère marier bientôt et un garçon de 10 ans, il est pourtant sur les sentiers himalayens 9 mois par an, loin de sa famille et de sa femme qui gère la maisonnée en son absence. Notre trek sonnait aussi pour lui la fin de la saison, il repartait ensuite 3 mois chez lui, s’occuper du riz que sa femme venait de récolter, de son millet, de ses poules et de ses cochons.
Une vie difficile, de dur labeur, que Dil porte sur son visage et son dos, mais une gentillesse légendaire, un coeur d’artichaut, une flexibilité à toute épreuve et une générosité remarquable. Un peu trop porté sur le Rakchi, l alcool local, certes, qu’il essayait tant bien que mal de me cacher; les soirs, il devenait alors très bavard et ses yeux rougis par l’ivresse ne laissaient aucun doute quant à l’origine d’une humeur soudain si guillerette après nos 6 heures de marches quotidiennes…
Mais je l’aimais bien mon Dil, lui qui connaissait tous les raccourcis du circuit, et me faisait passer hors des sentiers battus, lui qui me servait mes repas le soir, me soufflait sur les doigts quand ceux-ci étaient trop froids, lui qui m’encourageais sans relâche dans les quelques montées très difficiles, quitte à me raconter des bobards pour me garder motivée, lui qui faisait des blagues qu’il était le seul à comprendre et qui aidait même les personnes avec qui nous marchions…
Je me devais moi aussi d’être là pour lui et le prenait presque de force chez le médecin à Manang déterminer l’origine de sa toux douteuse; nous formions une équipe de choc!
Tout le monde me demande: « 26 jours avec ton porteur, mais comment as-tu fait? » Nous avons bien sur eu nos moments hauts, nos moments bas, nos disputes, nos réconciliations, nos mises au point (tous ça dans son anglais très approximatif, dans mon nepali encore plus douteux, des gestes, des dessins… on s’adapte!); dans tous les cas, je lui suis mille fois reconnaissante d’avoir fait de ce trek une grande aventure humaine!