Imaginez-vous: nous sommes en 1958, vous êtes un cinquantenaire anglais vivant à la Havane depuis une vingtaine d’années une petite vie sans vagues entre votre business d’aspirateurs et votre jolie (et manipulatrice) adolescente de 16 ans, fervente chrétienne que vous élevez seul et dont les extravagances et l’éducation vous mettent proprement à sec tous les mois.
Jusqu’au jour où un dénommé Hawthorne, un homme aux allures mystérieuses, vous propose de devenir espion pour les services secrets moyennant de très belles sommes d’argent… vos impératifs? rien de bien méchant,on vous demande juste de garder les yeux ouverts et d’envoyer un rapport hebdomadaire à Londres. Que faites-vous? Vous n’avez jamais fait ce genre de travail avant? l’espionnage n’est pas votre tasse de thé? pas grave, vous acceptez et faites marcher votre créativité!
C’est ainsi que James Wormold devient agent double sans le vouloir, en pleine Guerre Froide, et poussé par des supérieurs impatients, monte des histoires extravagantes et créé des personnages complètement fictifs inspirés de journaux ou de connaissances éloignées. Jusqu’à ce que la réalité rattrape la fiction…
Drôle, mordant, totalement cynique, Graham Greene nous invite dans les méandres de la politique interne britannique et des inepties du système. Lui-même au service de la couronne (le fameux MI6) en 1941, Greene revient sur ces années avec beaucoup de dérision; cette histoire s’inspire d’ailleurs de l’histoire vraie d’un agent double espagnol vivant à Madrid, en charge de fournir des informations aux allemands.
J’aime le style très dynamique du récit, les dialogues et l’humour caustique de l’auteur, qui publie ici un petit bijou d’espionnage sur fond de faits divers. Une ribambelle de personnages aussi attachants que loufoques gravitent autour de Wormold et prennent toute leur dimension dans des dialogues bien montés.
Intemporel, ce roman est à dévorer sans modération.

Plus d’infos sur le livre ici
En francais, Notre Agent a la Havane
Lire aussi la critique de Travels with my aunt, un autre bijou de Graham Greene

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